La traditionnelle enquête de Pôle emploi sur les « besoins en main-d’œuvre des entreprises » pour l’année 2022 fait état pour l’Ile-de-France de 532 982 intentions d’embauches, soit près de 12 % de plus qu’en 2021. De quoi compliquer encore davantage les difficultés de recrutement.

« Les résultats de l’enquête BMO 2022 (dévoilés le 6 avril, ndlr) reflètent le fort dynamisme de l’activité actuelle : le nombre de projets de recrutement est à un niveau jamais atteint, et les difficultés de recrutement sont également à leur plus haut niveau historique », reconnait-on à Pôle emploi. Un constat à temporiser toutefois avec les doubles incertitudes liées d’une part à la crise ukrainienne et d’autre part à la pandémie de Covid-19. « A ce jour, nous ne remarquons encore aucun ralentissement et les offres restent très dynamiques », prévient toutefois le service public de l’emploi.

Ainsi, les quelque 64 700 entreprises franciliennes ayant répondu au sondage de Pôle emploi fin 2021, sur les 302 000 établissements interrogés, font état de 532 982 projets de recrutements cette année, soit une progression de 11,7 % par rapport à 2021 et de 8 % par rapport à 2019. Cela représente 17,5 % des 982 intentions d’embauches nationales. 28,3 % des établissements franciliens envisagent de recruter contre 22,7 % l’an dernier. Il s’agit en majorité de CDI (43,5 %), mais aussi de CCD de six mois et plus (7,4 %).

Avec 160 904 intentions d’embauches, Paris rassemble le plus grand nombre de projets de recrutement, soit près de 30 % des projets franciliens. Mais la progression est moins importante que dans le reste de la région (+ 9 %). Les Hauts-de-Seine arrivent en second avec 85 555 projets de recrutement (16,1 % des projets franciliens). Cependant, ce niveau est en retrait de 2,1 %, « cette baisse s’explique probablement par la diminution des intentions d’embauches dans le secteur de l’informatique dont le poids est particulièrement important dans ce département », analyse Hélène Moutel, directrice régionale adjointe de Pôle emploi Ile-de-France. Les deux territoires représentent quasiment une intention d’embauche sur deux de la région. Les centres de décision (sièges sociaux de grands groupes) présents à Paris tout comme dans les Hauts-de-Seine (La Défense) expliquent, selon Pôle emploi, cette forte concentration des projets de recrutements.

Mais c’est dans les Yvelines (+ 20,6 %, 52 215) et en Seine-et-Marne (+ 20 %, 47 004) que la progression des intentions d’embauches est la plus forte, « boostées dans ce dernier par la croissance des secteurs de l’agroalimentaire (+ 51 %) et de l’hôtellerie-restauration (+ 40 %) », explique Hélène Moutel. En Seine-Saint-Denis aussi l’évolution est importante (+ 19,1 %, 57 430). Parmi le top 3 des métiers les plus recherchés figurent les agents de sécurité et de surveillance, les agents d’entretien de locaux. Dans le Val-de-Marne, le nombre de recrutements envisagés par les employeurs (48 961) croît de 16,5 % par rapport à 2021.

La pénurie de candidats, première cause des difficultés de recrutement

Les métiers d’artistes, professeurs d’art (musique, danse, spectacles) concentrent le plus d’intentions de recrutement en 2022 (pour la plupart en contrat saisonnier), suivis des « ingénieurs et cadres d’études, chefs de projets informatiques ». Parmi les profils les plus recherchés, on retrouve aussi des métiers en lien avec la reprise des activités post crise sanitaire (employés polyvalents de cuisine, agents d’entretien de locaux, serveurs de cafés, de restaurants et commis, etc.), ainsi que ceux du commerce et de la construction (ouvriers non qualifiés du second et du gros œuvre, maçons, plombiers, chauffagistes) sont les plus recherchés.

Les difficultés de recrutement suivent la même évolution en progressant de 8,8 points en un an, ce qui fait que près de la moitié des projets d’embauches (45,4 %) sont jugés difficiles. Mais il est, semble-t-il, moins difficile d’embaucher en Ile-de-France que dans le reste du pays où 58 % des projets sont jugés difficiles. Le secteur de la construction, avec un total de 49 915 projets, présente le plus de difficultés de recrutement en Ile-de-France (60,9 %). L’IAA (industrie agro-alimentaire) et l’agriculture, l’industrie manufacturière et le secteur des services sont relativement proche du taux régional (45,4%).

Les premières causes de ces difficultés proviennent en majorité, selon les employeurs, de la pénurie de candidats (+ 10 points en un an), de leur inadéquation aux postes et du déficit d’attractivité des métiers en tension (+ 5 points). « Pour remédier à ces difficultés, les dirigeants misent sur la formation des candidats », indique Hélène Moutel, rappelant que 150 000 places de formation sont disponibles en Ile-de-France cette année. Entre fin mars 2021 et fin mars 2022, les entrées en formation ont progressé de 10 % dans la région. « Six employeurs sur dix comptent faire appel à Pôle emploi pour leurs recrutements et 41,9 % à d’autres intermédiaires spécialisés », souligne également Hélène Moutel.

Pour réussir à recruter, les employeurs n’ont pas encore tout essayé… C’est, en substance, le message que veut faire passer Pôle emploi en cette année 2022 où s’exacerbent les tensions de recrutement. Musclant depuis plusieurs années ses équipes de « conseillers entreprises », l’opérateur public dispose aujourd’hui d’un bon aperçu des pratiques des recruteurs privés. « Il faut faire bouger les lignes des processus de recrutement », a souligné la directrice de Pôle emploi en Ile-de-France, Nadine Crinier, à l’occasion d’un bilan de l’année 2021 le 16 février 2022. Au-delà de la visibilité des offres, « très importante », elle appelle non seulement à accélérer les délais d’embauche ou à rendre leurs offres plus attractives, mais aussi… à s’ouvrir davantage aux demandeurs d’emploi. Une source de réticences pour nombre d’employeurs.

De nouvelles sociétés finissent pourtant par se laisser convaincre. C’est le cas du hub Fedex de Roissy-Charles-de-Gaulle (3 000 salariés) dont l’activité de fret aérien, fortement stimulée par l’explosion du e-commerce, l’a conduite à devoir recruter en masse. C’est ce qui l’a convaincu de recourir aux services de Pôle emploi, lui permettant d’embaucher depuis l’été dernier… 440 personnes en CDI, dont 209 agents de tri. Pour ces profils, l’agence de Roissy lui a proposé d’utiliser la méthode de recrutement par simulation, une approche utilisée de longue date. Pôle emploi organise des exercices pratiques correspondant au poste visé afin d’évaluer les « habiletés » des candidats. Une manière de dépasser la barrière du CV et de lever les hésitations des candidats à postuler.

Rencontres en chair et en os

Du côté de l’entreprise, cette méthode appelle à modifier ses représentations. « Il y a eu quelques résistances au début mais en entretien, ces candidats ont su nous convaincre, reconnaît Sliman Layadi, coordinateur ressources humaines chez Fedex. Cette expérience nous a permis d’atteindre des profils totalement éloignés de l’activité du transport logistique et aérien qui n’auraient pas pu être présentés à nos managers recruteurs. » Pour le recrutement des agents de piste, poste exigeant des qualifications plus spécifiques, et bientôt sur celui des techniciens de piste, l’entreprise appuie désormais sur la capacité des conseillers à leur recommander des demandeurs d’emploi et d’en rencontrer à l’occasion d’événements de type job dating.

En Ile-de-France, Pôle emploi intensifie les rencontres entre candidats et recruteurs en chair et en os. L’enjeu ? « Montrer que l’agence Pôle emploi est un lieu où on peut trouver de l’emploi », souligne Stéphane Crusoé, directeur de l’agence de Paris-Cardinet, qui organise par exemple des sessions de job dating auxquels participe le groupe d’intérim Crit. Une expérience concluante, fait valoir Karim Makhlouf, directeur agence CRIT Paris Lafayette : « On noue une vraie relation de proximité. Chaque recruteur va faire un point pendant 20 minutes avec le candidat. Il est arrivé qu’on propose un emploi immédiatement, dans les deux jours qui suivent la session. » Selon Stéphane Crusoé, ces résultats positifs s’expliquent par le travail de sélection et de préparation des candidats effectué par les conseillers. « Les opérations de masse ne fonctionnent pas forcément, il vaut mieux proposer un profil qu’on connaît », souligne-t-il.

Conséquence d’une activité notariale qui n’a sans doute jamais été aussi intense, les études franciliennes cherchent par tous les moyens à recruter. « En France entière, elles ont actuellement besoin de 4 000 collaborateurs tous postes confondus, dont 1 500 en Ile-de-France. Et ce chiffre devrait continuer d’augmenter », indique Estelle Amram, vice-présidente de la Chambre des notaires de Paris. La loi Croissance de 2015, qui a rendu plus aisée la création d’une étude, a également eu des conséquences sur le marché de l’emploi. Le nombre d’offices enregistrés à la Chambre de Paris (Paris, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne) est passé de 263 en 2016 à 480 aujourd’hui.

Résultat, le secteur peine à recruter. Si tous les échelons d’une étude sont touchés, c’est sur le segment des collaborateurs, qu’on appelait autrefois les clercs, que le mal est le plus profond. Nicolas Delouis, notaire dans le 17e arrondissement, confirme cet état de fait : « Si nous avions deux collaborateurs de plus, ce serait bien. Nous n’en trouvons pas, car c’est le plein emploi. De plus, beaucoup de nouvelles études se sont créées et ils ont eux aussi besoin de collaborateurs. »

Les diplômés des filières notariales – les BTS qu’il est ensuite nécessaire de former en interne, les licences professionnelles et les diplômés de l’Institut des métiers du notariat – étant en nombre insuffisant, la Chambre veut inciter à un recrutement plus large. « Nous pouvons intégrer des personnes qui ont une bonne formation juridique, un master en droit de l’urbanisme, en droit civil ou fiscal. Nous avons fait une campagne de sensibilisation à l’automne auprès des présidents d’université sur cette question », indique Maître Amram, qui est également responsable de la formation au sein de la Chambre. Les notaires cadres, ceux qui ont le diplôme mais ne sont pas associés, sont également devenus une denrée rare, même si la pénurie est moins grande. Barbara Thomas-David, notaire dans le 14e arrondissement, voit plusieurs raisons à cette situation. « Les nouvelles études ont créé de l’attractivité pour des personnes qui avaient envie d’être emportées dans un nouveau projet avec la possibilité d’être associé à terme. Je note aussi le désir de collaborateurs de partir en Province, et cela avant-même le Covid. »

Des comptables à former

Dernier poste où il est difficile de recruter : les comptables dits taxateurs. « Nous pourrions aller les chercher chez un expert-comptable mais il y a une vraie spécificité métier. Un comptable n’est pas tout de suite opérationnel », estime maître Delouis. « Lorsque nous recrutons ce type de poste, nous nous adressons à tous les comptables car nous avons un système de formation continue qui permet de transformer un généraliste en spécialiste », précise Estelle Amram. Pour celle qui est également notaire au sein de l’étude parisienne 1768Notaires, « les étudiants et même les personnes qui cherchent à se réorienter doivent savoir que le notariat est une profession stimulante dans laquelle ils vont s’épanouir. Elle se rajeunit avec une moyenne d’âge de 44 ans, se féminise puisque plus de 56 % des notaires sont des femmes, et les salaires sont attractifs. C’est enfin un métier qui évolue avec une relation client intéressante et des opérations stimulantes en droit de la famille, des entreprises et en immobilier. »

A compter de début mai 2021, Le journal du Grand Paris des talents diffusera 15 000 offres d’emploi sélectionnées par l’Apec Ile-de-France. Son délégué régional, Guy Gustin, présente l’organisation de l’association pour l’emploi des cadres dans la région Capitale et la palette de services proposée tant aux demandeurs d’emploi qu’aux personnes en activité, ainsi qu’aux entreprises.

Comment est organisée l’association pour l’emploi des cadres (Apec) en Ile-de-France ?

Avec 1,4 million de cadres, la région Capitale rassemble le plus grand nombre de cadres de France. Dès lors, l’Apec dispose en Ile-de-France d’une organisation adaptée à cette forte présence, à savoir une équipe de 280 salariés (consultants en développement professionnels, consultants relations entreprise, conseillers clients) répartis dans neuf centres. Le principal se trouve à La Défense (plus de 60 personnes), cinq sont positionnés dans Paris intra-muros (Franklin Roosevelt, République, gare de Lyon, boulevard Brune et Ballard) et trois en banlieue à Vincennes (Val-de-Marne), Evry-Courcouronnes (Essonne) et Cergy-Pontoise (Val d’Oise). Mais le principe de notre fonctionnement est qu’un cadre peut choisir le centre qui lui convient le mieux en fonction de son lieu de travail ou de résidence. De plus, chacun de nos centres réalise l’ensemble des prestations proposées par l’Apec.

L’Apec n’est pas uniquement destinée aux cadres sans emploi ? 

Si près de la moitié (44,5 %) des personnes qui nous font appel sont des demandeurs d’emploi, le tiers (31 %) sont en activité. Ces derniers nous sollicitent par exemple lorsqu’ils pressentent que leur emploi est menacé et anticipent un éventuel licenciement. D’autres se renseignent sur la mobilité interne fonctionnelle ou géographique, ou sur la préparation de leur entretien annuel. Il faut avoir en tête que l’Apec est l’un des acteurs du CEP, le conseil en évaluation professionnelle.

Enfin, le reste de nos publics sont les jeunes diplômés qui arrivent sur le marché du travail. Ils ne sont pas encore cadres, mais nous les accueillons néanmoins pour les aider à trouver leur premier emploi. Cette action a été particulièrement mise en avant avec la crise sanitaire au travers du dispositif « Objectif premier emploi » qui a pour objectif d’accompagner vers l’emploi 50 000 jeunes en France entre septembre 2020 et juillet 2021.

Proposez-vous d’autres dispositifs adaptés à des publics spécifiques ? 

L’Apec a aussi vocation à accompagner les seniors à partir de 55 ans et les cadres demandeurs d’emploi de longue durée, soit plus de deux ans, par le biais de séminaires afin de les remotiver et de bâtir un projet professionnel. Nous menons aussi des actions en faveur des jeunes résidents en QPV (quartiers prioritaires de la politique de la ville). En retour des cotisations acquittées par les entreprises, ces dernières bénéficient également d’un certain nombre de services.

Quels sont-ils ?

En premier lieu, il s’agit de la diffusion de leurs offres d’emploi. Nous pouvons aussi les aider à rédiger ces offres, ce qui est surtout utile pour les PME ne disposant pas en interne des ressources nécessaires. Il en est de même pour le sourcing, c’est-à-dire la présélection de candidats permettant de retenir cinq ou dix profils pertinents par rapport aux besoins de l’entreprise.

Enfin, nous informons les dirigeants sur les nouveaux dispositifs réglementaires tels que la mise en place de l’index de l’égalité professionnelle obligatoire pour toutes les entreprises d’au moins 50 salariés ou la mise en place de l’entretien professionnel, rendez-vous entre le salarié et l’employeur obligatoire tous les deux ans. En Ile-de-France, nous disposons de 17 consultants spécialisés dans l’accompagnement des entreprises.

Que peut apporter le partenariat avec Le journal du Grand Paris à l’Apec Ile-de-France ? 

La diffusion de nos offres d’emploi ciblées sur 20 secteurs (lire par ailleurs) leur offrira une visibilité encore plus grande, ce qui ne peut être que bénéfique tant pour les cadres sans emploi dans cette période particulièrement difficile que traverse l’Ile-de-France, que pour les employeurs qui préparent la reprise et recherchent de nouvelles compétences.

A l’antenne de l’Apec (Association pour l’emploi des cadres) de La Défense (Hauts-de-Seine), une dizaine de jeunes diplômés sont réunis à bonne distance, pour un atelier de quatre heures. L’objectif ? Les aider dans leur recherche d’emploi, car dans le contexte de crise qui perdure un diplôme d’études supérieures ne suffit plus à décrocher un contrat.

« Très courtisés par les entreprises avant la pandémie (de 25 % de jeunes à l’Apec en 2010, leur part avait chuté à 17 % en 2019), les jeunes sont les premiers impactés par l’arrêt des embauches des entreprises », constate Gilles Gateau. De plus, ajoute le directeur général de l’Apec, « les stages ont sauté en 2020 alors qu’ils sont souvent le premier stade avant l’embauche ».

Accompagnement personnalisé

Le baromètre Apec de janvier 2021 fait état d’une baisse de 40 % des embauches des jeunes diplômés en 2020, la moyenne des cadres s’établissant à – 30 %. Aussi, l’Apec a décidé de prendre le problème à bras le corps en lançant en septembre dernier l’opération « Objectif premier emploi ». La démarche vise à doubler, d’ici à l’été prochain, le nombre de jeunes accompagnés vers l’emploi, soit 50 000 contre 25 000 en temps normal, dont près de la moitié (23 900) en Ile-de-France.

De quoi apporter des réponses concrètes à ces jeunes perdus dans la multitude des options qui s’offrent à eux, sans pour autant aboutir à des résultats concrets. Juriste, licenciée dans le domaine de l’édition, diplômé d’un master 2 en création visuelle et communication digitale, ingénieur en maintenance industrielle ou en systèmes complexes, en recherche de stage ou d’alternance en ressources humaines… si les profils sont variés, les difficultés d’insertion professionnelle sont identiques. Aussi, Manon, Julio, Raphaël, Margarette, Abdou et leurs collègues d’une matinée voudraient bien améliorer la réalisation de leur CV, optimiser leurs recherches, arriver à attirer l’attention des éventuels recruteurs, avoir des réponses à leur candidatures, mettre la lumière sur leurs atouts ou encore orienter leurs recherches de manière efficace. Ils sont a priori au bon endroit.

Objectif à moitié atteint

« Tout l’intérêt de cet atelier, a expliqué en introduction Nafissa Hajdi, est de vous permettre d’avoir les bons outils, les bons réflexes, les bonnes démarches pour maximiser vos chances ». Cette consultante en développement professionnel à l’Apec fait partie de l’équipe constituée par l’association pour mener à bien la mobilisation en faveur des jeunes diplômés. Pour ce faire, l’Apec a bénéficié de 4 millions d’euros du plan de relance, afin de recruter 28 consultants en CCD de neuf mois.

A ce jour, l’objectif est à moitié atteint, avec quelque 25 000 participants aux ateliers, dont 12 000 Franciliens et un tiers d’entre eux suivis en entretien individualisé par la suite. En effet, ces rencontres au départ collectives permettent aussi d’identifier des difficultés individuelles et d’y remédier par un accompagnement personnalisé. Cependant, Gilles Gateau estime que des marges de progression sont encore possibles, puisque le taux de remplissage des ateliers est de seulement 80 %, mais il déplore surtout une perte d’un quart des inscrits, qui ne se présentent pas le jour dit.

Créé par BpiFrance sur le modèle du volontariat international en entreprise et mis en œuvre en 2019 pour attirer des bacs + 2 à bacs + 5 vers des PME/ETI situées dans des zones trop peu attractives, le volontariat territorial en entreprise (VTE) ne visait pas a priori l’Ile-de-France. Pourtant, parmi les 675 contrats signés en 2020, 95 l’ont été dans ce territoire. « C’est logique au regard du poids économique de la région. Mais y voir des VTE a aussi un sens, car le but du dispositif est de faire venir des diplômés, en particulier des bacs + 5, vers ces PME/ETI, d’autant que ce sont elles qui créent de l’emploi », analyse Alexandre Rigal.

Communication ciblée

« Cet objectif est atteint à travers une communication ciblée vers les écoles de commerce ou d’ingénieurs, alors que ces profils pensent plus spontanément aux grands groupes », ajoute le directeur du développement de Bpifrance Excellence. « Et même si la dimension territoriale est moins prégnante qu’en province, elle n’est pas inexistante. Beaucoup d’entreprises franciliennes se sont installées dans des quartiers prioritaires de la ville pour bénéficier d’aides mais elles ont besoin de se rendre attractive. »

Une analyse que confirme Olivier Crus, dirigeant de Reprotechnique. Cette imprimerie numérique, dont le siège est à Colombes (Hauts-de-Seine), a saisi l’opportunité offerte par le VTE pour recruter en CDD un diplômé de la Paris school of business : « Il est plus compliqué de faire venir des bacs + 5 quand on est banlieue qu’à Paris intra-muros. »

VTE vert

Le VTE ne bénéficie d’aucune aide financière de l’Etat, à l’exception des entreprises situés dans des territoires d’industrie (4 000 euros) et, depuis quelques mois, de celles engagées dans une démarche de transition écologique. Ce sont les VTE verts, qui bénéficient d’une aide de 8 000 euros à la première embauche. « Mais nous ne sommes pas dans une logique d’emploi aidé. Avant la crise sanitaire, ces PME allaient bien et même depuis, elles ont toujours du mal à embaucher. L’idée est plutôt de proposer une communication les mettant en contact avec les écoles de l’enseignement supérieur », indique Alexandre Rigal.

Edouard de Rugy, dirigeant de Reanova, société spécialisée dans la rénovation énergétique des immeubles en co-propriété, le reconnait : « Notre VTE vert, présente depuis novembre 2020 en CDI et qui est destinée à devenir cheffe de projet, est diplômée de la Skema, une école de commerce de Lille. Elle ne serait pas venue chez nous s’il n’y avait pas eu le VTE. »

La fonction jouée par le VTE est en principe celui de bras droit du dirigeant. « L’idée était de m’assister dans mes tâches quotidiennes. C’est un poste valorisant qui lui a permis d’être confronté à des problématiques complètement différentes de celles d’un grand groupe », souligne Olivier Crus. Et pour Alexandre Rigal, la crise du Covid a encore rendu plus pertinent le VTE : « Dans cette situation particulière, les entreprises doivent s’engager dans un certain nombre de transitions technologiques. Si les process ne sont pas digitalisés, si vous n’êtes pas engagé dans une transition écologique, ce sera plus difficile. Avec son regard neuf, le VTE vous change de l’intérieur », résume le directeur du développement de Bpifrance Excellence.

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